Félicie de Marivaux : une adaptation audacieuse !

Chaque année, Paris offre une programmation théâtrale si riche, qu’il est souvent difficile de faire un choix dans cette déferlante de pièces classiques ou contemporaines, inédites ou pas, promettant au spectateur de passer une soirée, si ce n’est inoubliable, du moins suffisamment digne d’intérêt pour ne pas avoir à regretter les quelques euros dépensés au guichet. Cependant, il arrive parfois qu’un projet ambitieux sorte de la masse en titillant, par son insolence, notre curiosité. C’est le cas de cette pièce de Marivaux, intitulée « Félicie », dont la renommée ne semble pas être parvenue jusqu’à nous puisque son auteur, Marivaux, n’a pas souhaité la présenter au public lors de sa création, craignant que le pétillant des dialogues eût été moins savouré qu’à la lecture.

La volonté première de l’auteur n’a, pourtant, pas effrayé le metteur en scène de cette version programmée au Petit Théâtre du Gymnase à partir du 2 Octobre 2016. Paolo Domingo signe, en effet, ici, avec audace, une adaptation de l’œuvre, en y ajoutant quelques scènes supplémentaires, à l’image de l’auteur Marie-Jeanne Riccoboni qui avait, à son époque, rédigé une suite au roman inachevé de Marivaux : « la vie de Marianne ».

Cette démarche, suffisamment inconvenante et originale pour susciter l’intérêt, nous invite à suivre le parcours initiatique d’une jeune ingénue au prise avec les caprices d’une passion amoureuse toute nouvelle. Un spectacle, emprunt d’un moralisme certain puisqu’inhérent à Marivaux et qui, de toute évidence, ne manquera pas de faire parler de lui.

BM.

Résumé :

Évoluant dans un monde enchanté, Félicie semble avoir toutes les grâces. Parfaitement comblée, elle demande néanmoins à la fée Hortense, sa marraine, le don de plaire ; ce qui lui est immédiatement accordé. Enchantée par ce nouvel agrément sensé la rendre aimable aux yeux de tous, Félicie fait l’expérience de la passion au travers de Lucidor. Le jeune galant éveille alors les failles de l’ingénue, et la propulse inexorablement dans un univers bien plus sombre, qui lui était jusque-là totalement inconnu…

Auteur : Marivaux

Adaptation et Mise en scène : Paolo Domingo

Musique : Frédéric Dunis

Décor : Anne d’Alançon

Avec : Camille Casanova, Nadia H. Cordier, Caroline Klaus, Christophe Maniez, Anne-Laure Maudet, Fanny Passelaigue, Priscillia Shillingford

NOTE DE MISE EN SCÈNE : 

A l’heure des réseaux sociaux et sites de rencontre en tout genre, croiser son âme sœur n’a jamais été plus problématique. En effet, les conflits affectifs se révèlent de plus en plus tôt dans une relation et pour y échapper, certains vont même jusqu’à enchaîner les rapports multiples, tombant dans une « frénésie amoureuse », qui, bien loin d’aboutir sur une vie stable et paisible, pousse l’être humain sur un terrain glissant progressivement vers une addiction certaine : la dépendance au relations furtives.

Plusieurs questions se posent alors : Peut-on trouver chez l’autre cette complémentarité tant recherchée ? L’homme et la femme sont-ils en mesure de partager un amour sain, dénué de rapports de force, ou doivent-ils composer avec des rôles préétablis par la société, leur permettant, au travers d’un conditionnement sournois, de jouer leur partition respective ?

Ce sont là les questions qui me sont apparues en lisant « Félicie ».

Cette comédie de Marivaux, qui n’a encore jamais été jouée car son auteur pensait que le piquant du dialogue aurait été moins percutant qu’à la lecture, nous parle des égarements d’une jeune fille face à l’expérience de la passion. J’ai été profondément charmé par cette pièce en un acte, qui parle inexorablement aux cœurs de celles et de ceux qui, un jour, se sont perdus dans les méandres d’une passion amoureuse déséquilibrante voire même destructrice. Une idée a germé alors. Une idée aussi excitante que provocante. Celle de faire découvrir, au plus grand nombre, et malgré la volonté première de son auteur, cette œuvre méconnue de Marivaux. La pièce étant trop courte, j’ai eu l’audace d’y ajouter quelques scènes, quelques répliques ici et là, ainsi que deux personnages qui n’existent pas dans l’histoire originale. Je me suis attaché à respecter l’univers éthéré de la pièce en tentant de reproduire la fluidité et la délicatesse des mots de cet écrivain Français pour lequel j’ai une grande admiration. J’espère humblement y être parvenu.

Paolo DOMINGO

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